Déclarer les accidents de travail - Cordel N°62
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Les accidents de travail c’est important, il faut les déclarer, car on a des droits
Quand doit-on penser à déclarer un accident du travail ?
En pratique, un accident du travail est un accident qui survient sur le temps ou le lieu de travail d’un.e salarié.e, quelle qu’en soit la cause. Il faut préciser que l’événement en question doit pouvoir être daté de manière certaine, mais que les conséquences ne sont pas forcément immédiates par exemple, un hématome peut apparaître 24h plus tard.
Les accidents de trajet peuvent aussi être déclarés en accident du travail. L’accident doit se produire sur le trajet entre le lieu de travail et le logement ou le lieu de restauration. Ce trajet doit être le plus habituel possible et ne pas avoir été interrompu ou détourné pour un motif d’ordre personnel.
J’ai eu un problème au travail, pourquoi est-ce important de le déclarer en accident du travail ?
Parce que cela marque la responsabilité du travail dans la survenue des symptômes.
Parce que les soins médicaux nécessaires sont pris en charge à 100% avec une dispense d’avance de frais (tiers-payant).
Parce que le jour de l’accident est intégralement payé par l’employeur·euse si l’on doit s’arrêter. Les indemnités journalières sont ensuite versées par la Sécurité Sociale sans jour de carence (sauf en cas d’accident de trajet) et leur montant peut être plus élevé qu’en arrêt maladie.
Parce que cela peut permettre de percevoir des indemnités en cas de séquelles.
Parce que toute déclaration d’accident de travail doit être notifiée à l’inspection du travail et à la Caisse Régionale D’Assurance Maladie par l’employeur·euse ; le nombre et/ou la fréquence de ces déclarations peut donc servir d’alerte vis-à-vis des conditions de travail au sein de l’entreprise. L’employeur peut payer une cotisation sociale plus importante en fonction du nombre d’accidents de travail et/ou de maladies professionnelles qui ont lieu dans son entreprise, donc cela l’encourage à mettre en œuvre des moyens pour les éviter.
Parce qu’on ne peut pas être licencié·e lorsqu’on est en accident de travail.
Comment déclarer un accident du travail ?
- Dans les 24h qui suivent l’accident, le/la salarié·e doit en informer son employeur·euse. Ce/cette dernier·e lui remet alors la feuille d’accident du travail (cerfa n°11383*02) à conserver précieusement. Elle prouve que la déclaration à l’employeur·euse a été réalisée et donne droit à une dispense d’avance des frais médicaux. C’est à l’employeur·euse de déclarer l’AT à la caisse de Sécurité Sociale (CPAM) dont le/la salarié·e dépend.
Que faire si l’employeur ·euse refuse de me donner la feuille d’accident du travail ou ne déclare pas mon AT ? Le/la salarié.e garde la possibilité de déclarer lui/elle-même l’accident auprès de sa caisse dans un délai de 2 ans. Il/elle peut faire intervenir les syndicats ou l’inspection du travail.
- Dans les 48h qui suivent l’accident, je dois consulter un·e médecin pour avoir un certificat médical initial (cerfa n°11138*05). Le respect de de ce délai permet d’obtenir une reconnaissance automatique de la caisse en accident du travail. Le médecin doit décrire avec le plus de précision possible l’ensemble des lésions et des symptômes et doit déclarer même ce qui semble bénin au premier abord : certaines lésions peuvent évoluer en s’aggravant. C’est une étape très importante car les éléments absents ne seront pas pris en compte par la suite par la caisse et/ou l’employeur·euse. Si la consultation a lieu après le délai de 48h, la caisse réalise une enquête pour déterminer si les lésions décrites sont bien en lien ou non avec un accident du travail. Tant que la caisse n’a pas statué, la prise en charge (dont les indemnités journalières) est suspendue. Tant que le certificat final d’accident du travail n’est pas établi, le/la salarié·e doit retourner voir le médecin régulièrement pour avoir des certificats de prolongation. Si l’on ne fait pas ces certificats, les droits peuvent être interrompus.
Si l’accident de travail a entraîné un arrêt de travail, et que le/la salarié·e se sent prêt·e à reprendre le travail, le/la médecin doit indiquer sur le certificat d’accident du travail la date de reprise du travail. Mais il peut prolonger les soins après l’arrêt de travail. Attendre un peu pour rédiger le certificat final d’accident du travail (qui clôt le dossier auprès de la caisse) peut être prudent afin d’attendre une guérison ou une amélioration.
Dans tous les cas, le certificat comporte 4 volets. Les volets 1 et 2 sont adressés à la caisse de Sécurité Sociale du/de la salarié·e . Le/la salarié·e conserve le 3ème volet et adresse le volet 4 à son employeur.euse.
Citations « Ils m’ont amené devant un pylône presque déjà fini, ils m’ont expliqué que l’autre monteur était en congé maladie, ils m’ont donné les plans d’ensemble et le détail des nœuds à souder, et ils m’ont planté là.[...] Le pylône avait trente mètres de haut. […] Ils m’ont regardé d’un air bizarre et sur le moment j’ai pas compris pourquoi ; et puis, […] j’ai appris que le monteur précédent était pas en congé maladie mais qu’il avait été victime d’un accident, bref, qu’il avait fait un faux pas, qu’il avait dégringolé - pas de bien haut heureusement -, et qu’en définitive il était à l’hôpital avec plusieurs côtes brisées ». Primo Levi dans La Clé à molette « L’aérage s’établissait mal. On retira à trois reprises des haveurs* qui s’étaient évanouis, que l’asphyxie étranglait. » *haveur = mineur qui pioche dans le charbon Emile Zola dans Germinal |
Livres
Travailler peut nuire gravement à votre santé
Annie Thébaud-Mony, La Découverte, 2008.
Les Risques du travail : pour ne pas perdre sa vie à la gagner Annie Thébaud-Mony, Philippe Davezies, Laurent Vogel, Serge Volkoff, La Découverte, 2015,
Association
AAV : Association d’aide aux victimes
http://association-aide-victimes.com
Un combat de longue date La loi du 9 avril 1898 instaure pour la première fois des règles d’indemnisation pour les victimes d’accident du travail. L’assurance contre les risques professionnels, c’est-à-dire la branche « accident du travail et maladie professionnelle » est intégrée aux missions de la Sécurité Sociale en 1946, un an après la création de cette dernière. A la différence de la branche maladie, la branche AT/MP est intégralement financée par les cotisations patronales. Ces dernières varient en fonction du nombre d’accidents du travail survenus dans l’entreprise. Officiellement la branche AT/MP est la seule branche de Sécurité Sociale à l’équilibre financièrement. Mais selon des statistiques récentes, au moins 20% des accidents du travail ne seraient pas déclarés* au bénéfice des entreprises et au détriment des travailleur·euse·s *Rapport de la commission instituée par l’article L.176-2 du Code de la Sécurité Sociale Lire le "Guide questions-réponses : accidents du travail, accidents de trajet et maladies professionnelles" de la CGT http://cgt.cnim.free.fr/ cariboost_files/2013_brochure_ 20accidents_20du_20travail.pdf |
Consolidation et rechute
Lors de la rédaction du certificat final, le/la médecin peut estimer que la guérison est totale. Mais si des lésions persistent sans perspective d’évolution, le certificat doit indiquer « consolidation avec séquelles ». Même en cas de guérison, on peut de craindre une rechute et cocher alors « guérison apparente avec possibilité de rechute ». Cela peut permettre d’obtenir plus facilement l’accord du/de la médecin conseil lors d’une rechute effective.
En cas de rechute survenant dans la même entreprise mais parfois longtemps après l’accident du travail, le/la médecin rédige un certificat médical de rechute comportant la date de l’accident de travail « initial » et le fait nouveau (aggravation d’une lésion initiale, apparition d’une nouvelle lésion secondaire à l’accident). Le/la médecin conseil doit donner son accord à une prise en charge au titre de l’accident de travail pour pouvoir bénéficier des mêmes droits que lors de l’accident de travail initial (prise en charge à 100% des soins médicaux, indemnités journalières, etc.)
Quand le certificat final note une « consolidation avec séquelles », une évaluation des conséquences de l’accident va être faite par le/la médecin conseil, entraînant une indemnité selon la gravité de ces séquelles (cette estimation peut être contestée si on estime qu’elle est sous évaluée). Si on a encore besoin de traitements (comme de la kinésithérapie) le/la médecin traitant·e peut demander des « soins postconsolidation » avec un formulaire à commander sur le site ameli (formulaire 649-03-2001) qu’il/elle envoie à la caisse de Sécurité Sociale du/de la patient·e.
|Cordel écrit par le Collectif Outils du soin - Mars 2019 - Cordel n° 62 - www.outilsdusoin.fr|
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